Interview with Ron "Bumblefoot" Thal

 
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Après un dernier passage en 2006 à Paris Bercy, Guns n' Roses sont de retour en territoire français pour trois dates, les premières depuis la sortie du désormais mythique (pour de bonnes et mauvaises raisons) « Chinese Democracy ». Qu'est devenu ce groupe depuis toutes ces années et de multiples retours plus ou moins réussis ? Metalchroniques s'est rendu au concert donné à Amnéville le 10 Septembre pour vous en faire part. Et afin de vous donner l'avis le plus complet possible, nous avons aussi pris le temps de poser quelques questions à Ron "Bumblefoot" Thal qui a gentillement répondu à certaines de nos interrogations et nous a éclairé sur quelques détails. 
Le guitariste américain, dans les rangs du groupe depuis 2006, partage maintenant son travail avec Richard Fortus et DJ Ashba, fraîchement recruté dans le groupe de Nikki Sixx : Sixx AM. Et c'est donc tout naturellement que nous nous sommes demandé avant même le concert, en quoi consistait le travail de chacun des guitaristes, et comment l'arrivée de ce nouveau membre avait influé sur le travail du groupe :
 
« On a commencé à travailler ensemble en début 2009, en travaillant sur des lignes de guitare qui se complèteraient bien, en bossant sur différentes guitares, sur quelques amplis pour trouver des sons qui se mariaient bien. On a fait ça avec DJ et Richard pendant quelques mois à LA, puis on a fait une pause pendant l'été. J'ai rejoint Lita Ford pour quelques festivals en Europe et aux Etats-Unis, puis nous avons recommencé à bosser ensemble de Septembre jusqu'à ce que GNR prenne la route en Décembre... On a vraiment profité de ces moments ! »
 
Les portes de la salle s'ouvrent tôt face à un public encore clairsemé pendant cette soirée de fin d'été, et c'est déjà à 18h que les premiers fans pénètrent dans un Galaxie d'Amnéville qui n'avait pas, ce soir là, revêtu sa configuration maximale de 12000 places, certains gradins restant obstinément fermés au public. 
Les Murderdolls de Joey Jordison et Wednesday 13 ouvrent le bal sur six dates de cette tournée européenne, et c'est dans une ambiance assez motivée bien que teintée d'un peu de curiosité que le public mosellan accueille le groupe fraîchement sorti de hiatus. Un nouvel album est dans les bacs et ça se voit, puisque pas loin de la moitié des morceaux joués ce soir là seront tirés de « Women and Children Last » et on retrouve entre autre « Chapel of Blood », « Summertime Suicide » ou encore « My Dark Place Alone » alors que les anciens titres se regroupent autour d'un mythique « I Love to Say Fuck » ou d'un [i]« Kill Miss America ».
Il faut bien avouer que le groupe est en forme, les musiciens de session issus de Gunfire 76 et autres Bourbon Crow s'en tirent très bien, même si tous les yeux restent rivés sur les deux leaders. Le groupe, suspecté d'attendre sagement le feu vert des Guns pour quitter la scène, garde le public chaud pendant une bonne heure, à coup de lights assez sobres mais de tubes efficaces servis par un son tout ce qu'il y a de plus travaillé. Et c'est donc vers 21h15 que le groupe quitte la scène sous les applaudissements d'une salle maintenant pleine à craquer (enfin pour ce qui en est ouvert).
 
Connaissant la légende de Guns n' Roses et surtout de son excentrique leader Axl, c'est maintenant la peur qui se répand dans le public. « Combien de temps les fans vont-ils attendre ? », les paris sont lancés sur le potentiel retard d'Axl et c'est donc avec une surprise toute légitime que l'audience voit les lumières s'éteindre à 22h pile. Une surprise toute légitime effectivement car après les évènements singuliers, retards et autres shows suspendus dans des lieux comme Dublin ou pour les festivals de Reading et Leeds, il était tout naturel de s'attendre au pire... Questionné à ce sujet et à propos des réactions plus ou moins extrêmes des fans lors des fréquents retards du groupe, Ron se contente de répondre par un serein :
 
« Merci de ne pas nous avoir jeté de crêpes ! »
 
Le groupe débarque sur scène dans un éclair de son et de lumières aveuglantes (la pyrotechnie n'étant pas en reste sur cette tournée puisque le groupe nous ébloui à coup de lance-flammes, de fontaines en feux d'artifices et autres explosifs assourdissants...) et entame les festivités par un désormais typique « Chinese Democracy », suivi du triptyque « Welcome to The Jungle », « It's So Easy » et « Mr Brownstone »... Puis les fans vont avoir ce soir là le droit à un déluge de hits plus ou moins récents ; les plus anciens en recevant pour leur argent avec les inévitables classiques que sont « Sweet Child O' Mine » et autres « You Could Be Mine » alors que le nouvel album n'est pas en reste avec des titres comme « Street of Dreams » ou « Madagascar »... Une setlist dans laquelle le groupe laisse vraisemblablement un peu de place à l'improvisation comme nous le dit Bumblefoot :
 
« On a une liste de chansons qui composent les fondations de notre set, puis on fait des petites adaptations par-ci par-là, très souvent de façon spontanée. Tant qu'on ne laisse pas les gros « hits » de côté comme Jungle, Sweet Child, November, Paradise, Nightrain... ça nous va d'ajouter tout et n'importe quoi ! Je suis quelqu'un plein de ressources haha ! Une fois pour une tournée solo en France j'avais permis aux gens de voter pour les chansons qu'ils voulaient entendre sur scène. Il y en avait 75, j'ai choisi les 25 plus populaires et j'en ai fait une setlist. J'adorerais que GNR fasse quelque chose du genre, ce serait vraiment cool... »
 
Alors certes, quelle que soit la qualité du show, et malgré le choix des chansons plutôt large, reste l'éternel débat sur la validité historique de ce groupe dont seuls Axl et Dizzy Reed ont vécu la tournée Use Your Illusion, mais nous ne l'aborderons pas ici, si ce n'est pour laisser à Ron la possibilité d'exprimer son avis sur le fait que le groupe se fasse de plus en plus appeler sur internet « Axl's Cover Band » :
 
« L'opinion de ces personnes m'importe à peu près autant que l'opinion d'un végétarien sur les affaires d'un gérant de steakhouse ! Sur les nouvelles musiques il est vrai que je « reprend » les parties que j'ai écrites moi-même et que j'ai enregistrées avec les gens qui jouent dans le même groupe que moi ! Beaucoup de ces histoires portent sur le nom du groupe, il y en a qui s'offensent du fait que l'on conserve le nom originel après des changements dans le line-up et je les comprend, c'est pour cela que personnellement je fait référence au groupe sous le nom GNR... Je respecte ces changements mais je veux aussi que le groupe actuel sois reconnu pour lui-même et ne reste pas coincé dans les méandres du passé ! Mais vraiment il n'y a rien de plus important dans la vie ? Allez à un show et profitez-en ou bien restez chez vous à pleurer et à tenter de construire une machine à remonter dans le temps ! A vous de voir comment vous voulez occuper vos journées ! Ce groupe, comme tous les autres, existe pour ceux qui l'aiment, si ce n'est pas votre cas très bien, écoutez autre chose, il y a assez de musique dans le monde pour tout le monde ! Mais se plaindre autant n'a aucun sens, si vous n'aimez pas la viande, fermez-la et mangez vos légumes ! »
 
Ce que l'on a vu ce soir là sur scène, c'est un groupe carré et efficace, un Axl qui n'est plus le sex symbol de ses 30 ans et qui flamboie maintenant dans des costumes de grands couturiers mais qui a conservé une voix impressionnante. Les guitaristes sont en place et offrent un spectacle très efficace à de jeunes fans (oui, une majorité de la salle était assez peu âgée !) qui n'ont jamais pu voir les frasques de Slash, Duff and co sur scène et le tout avec une qualité musicale plus qu'intéressante. Reste un groupe qui ne semble pas assez remplir l'espace sur une scène beaucoup trop grande, des problèmes de son qui couvrent les cris d'Axl dès que les guitaristes se lancent dans leurs parties de lead... Et des solos, justement, peut-être trop nombreux, alors que Axl prend l'habitude ces dernières années de quitter la scène à chaque fois qu'une occasion se présente...
Ron Thal nous commente justement son approche des solos, puisque chaque guitariste a le droit à son heure de gloire durant le concert :
 
« J'ai commencé par une version instrumentale de Don't Cry pendant laquelle le public chantait avant que Axl me rejoigne pour finir le titre... Sur cette tournée je me suis penché sur le générique de la Panthère Rose, pour le fun ! A chaque fois que l'on joue c'est un peu comme une première fois pour le public puisque tout le monde ne nous suit pas sur plusieurs concerts ou à travers YouTube, ils vont à un seul show sans recherche préalable sur la tournée en cours donc c'est une nouveauté pour eux. Si on revient dans le futur je changerai tout ça. »

 
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Plutôt longs donc, ces solos qui finissent par être un peu envahissants mais qui, il faut l'avouer, ne peuvent ternir la riche setlist de 2h30 proposée par le groupe. Une setlist exhaustive donc, mais que les problèmes de son cités plus haut viennent parfois ravagée en s'attaquant à des classiques que le public attendait avec impatience. Et les nouveaux morceaux en prennent également pour leur grade, car même si l'ensemble est joué de façon millimétrée et puissante, il faut bien avouer qu'un titre comme « Better » ne passe pas la barrière du live de par son intro brouillonne et ses couplets surchargés qui finissent par ne plus aller dans aucune direction à force de s'éparpiller.
 
Il faudra donc bien avouer que même après un final grandiose avec une reprise du mythique « Whole Lotta Rosie » suivie d'un « Paradise City » ponctué d'un immense feu d'artifice et d'une pluie de cotillons, ce concert risque bien de laisser un goût amer d'inachevé dans la bouche de certains fans, qui garderont tout de même de beaux souvenirs dans leur mémoire, comme celui d'un « November Rain » orchestré de main de maître par un Axl encore capable de se montrer en grande forme...
 
Deux concerts suivront ce premier pas en terres françaises... Deux ? Et bien non : trois, puisque c'est avec surprise que la capitale accueillera le lendemain du concert parisien un second show surprise donné dans un bar cette fois, un événement que Ron Thal a pu nous commenter :
 
« Je me suis levé un matin avec un nouvel email qui me disait qu'on avait un show acoustique de prévu... Tout s'est mis en place très vite, et c'est ce que j'aime. Je veux dire, c'est souvent chaotique et on a pas le meilleur matos mais rien ne peut battre le fait de faire un show tout en mettant son chapeau sur la tête de quelqu'un d'autre, en attrapant la main d'une seconde personne et en parlant à une troisième ! On prend vraiment du bon temps, le groupe et le public en attendent la même chose et c'est beaucoup de partage ! »
 
Un concert dans le 16e qui fait figure de retour aux petites salles pour le Bumblefoot bien habitué à ce type d'ambiance, mais qui ne peut tout de même que difficilement départager le plaisir des lieux comme celui-ci de celui des grands stades :
 
« Si je ne faisait que des concerts en grandes salles, les petites me manqueraient ! Il y a un vrai trip dans le fait de regarder 100000 têtes qui se mêlent à l'horizon, mais on perd aussi une connexion qu'on ne peut avoir que dans les petites salles, où on peut tous se regarder dans les yeux ! Je préfère les petites salles en fait, pour cette raison, c'est une connexion irremplaçable ! »
 
Ce passage dans notre beau pays aura donc bien marqué les fans, mais aussi le groupe, puisque Ron nous avoue son amour pas si secret que ça pour Paris :
 
« C'était mon quinzième passage à Paris, enfin je crois... Je fais de la musique en France depuis 1997 et c'est toujours génial d'être de retour et de voir mes vieux potes. Après toutes ces années j'ai enfin été capable d'emmener ma femme faire la touriste. Elle est déjà venue souvent dans le pays mais c'est la première fois qu'elle avait l'occasion de faire ça et c'était génial. Les shows sont toujours fantastiques et j'adore voir des mosh pits dans la fosse, ça m'éclate ! »
 
Un retour des Guns que l'on ne pourra donc pas qualifier objectivement de totalement réussi, mais qui tout comme le dernier album aura laissé d'une façon ou d'une autre une trace, et qui vient juste à point pour réalimenter des débats qui n'en finiront peut-être jamais de recommencer...

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